Samedi j'évoquais le visage familier du jeune homme blond assis en face de moi, plongé dans son Courrier international. J'ai retrouvé à qui ses traits me faisaient penser. Ce sont ceux du jeune Adam Dobrowolski qui jouait Chopin dans un récital donné à Kraków.
En passant devant une maison, l'affiche attire mon regard, récitals de Chopin, presque tous les soirs. J'avais soif de musique, ça sentait l'attrape-touriste à plein nez, mais je me suis dit tant pis, j'essaie, peut-être que ce sera bien. Au final, j'ai perdu une heure et 40 zl. Le petit blondinet sort le grand jeu, destiné à épater un public facile. Il y parvient sans doute, à l'exception près que je ne suis pas un public facile, loin de là. Il joue toutes les pièces plus vite que ce dont il est capable, et accentue le caractère physique des pièces pour en mettre plein les yeux à ce "public du dimanche". Eux sont ravis, moi déçue. Je ne doute pas un instant que le jeune Polonais sait faire des choses magnifiques et créer des sonorités délicates qui émerveillent l'auditeur, lorsqu'il se trouve face à une assistance avertie qui ne se laisse pas duper par de la pseudo virtuosité (notre pianiste n'est pas une bête virtuose, bien qu'il ait essayé de le faire croire).
Dommage. J'espère qu'il apprendra à faire de la musique quel que soit le public devant lequel il se trouve.
Le second récital s'inscrivait dans les concerts Chopin des dimanches après-midi, sous le mémorial du compositeur dans le parc Lazienki. Tokiko Kobayakawa, jeune pianiste japonaise, retrouvait le piano installé au pied de la statue du maître, lequel surveillait la performance de son regard rêveur. Assise dans l'herbe, à côté d'un groupe de Français, j'ai écouté des Variations en Mi op.posth à l'articulation aristocratique et cristalline, qui m'ont beaucoup plu, et à la célèbrissime (et incontournable) Ballade n°1 en sol mineur op.23, avec un beau discours musical, malheureusement fréquemment interrompu par des passages techniquement pas trop au point, dans lesquels la pianiste laissait la musique de côté pour focaliser son attention sur la propreté. Une brève pause, je m'allonge, et tandis que résonnent l'Andante Spianato et Grande Polonaise op.22, un peu trop lente et pensive à mon gôut, les nuages jouaient dans le ciel bleu. Pour terminer, des oiseaux planent ivres d'espace au son d'un magnifique scherzo n°2 en si bémol mineur, op.31, que la Japonaise à magnifié par un jeu des plus subtils, usant de milles sonorités et couleurs différentes, pour en faire un vrai tableau impressioniste.
Sans doute la première et la dernière fois que j'entendrai Chopin en sentant l'odeur fraîche de l'herbe et en voyant les nuages folâtrer avec le vent.
Carl LOEWE – Gutenberg et le chœur des imprimeurs assassins
Il y a 1 semaine
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