samedi 28 mars 2009

Confessions d'un enfant du siècle (Alfred de Musset)

Je ne sais pas chez vous, mais ici, dans la campagne helvétique, le ciel est si lourd de pluie qu'il en semble tiré vers la terre. Alors on moud du café, on dispose deux biscuits sur la soucoupe et on verse un peu de lait dans la tasse colorée. Une journée parfaite pour avancer dans mes lectures - et mes travaux.

Folio, 268 pages


Quatrième de couverture:


Alors ces hommes de l'empire, qui avaient tant couru et tant égorgé.... se regardèrent dans les fontaines de leurs prairies natales, et ils s'y virent si vieux, si mutilés, qu'ils se souvinrent de leurs fils , afin qu'on leur fermât les yeux. Ils demandèrent où ils étaient; les enfants sortirent des collèges, et ne voyant plus ni sabres, ni cuirasses, ni fantassins, ni cavaliers, ils demandèrent à leur tour où étaient leur pères.Mais on leur répondit que la guerre était finie, que César était mort, et que les portrait de Wellington et de Blücher étaient suspendus dans les antichambres des consulats et des ambassades, avec ces deux mots au bas: salvatoribus mundi.

Alors il s'assit sur un monde en ruines une jeunesse soucieuse.


Mon avis: ****
Ce n'est là que ma deuxième lecture de Musset (!), la première ayant été Lorenzaccio, comme livre de bac. Je pense que j'ai préféré la pièce de théâtre à ce roman, qui est par moment réellement trop larmoyant pour moi. Toutefois, la fin élégante, noble même, sauve l'opus. Pour être sincère, je sais très bien qu'une grande part de mes réticences face à ce style parfois exagérément grandiloquent et pathétique vient du fait que je me sais parfaitement capable sinon de tenir les discours d'un Octave du moins de les penser et de les ressentir. Et voir cela par écrit me montre le ridicule de ses transports passionnés.
Mais pour en revenir aux Confessions, il me semble qu'il s'agit d'un roman clé dans la compréhension de la psychologie qui caractérise cette époque, faire le mal alors qu'on souhaitait pourtant de tout coeur faire le bien, comme Paul le disait déjà dans le NT. Musset a également rédigé une sorte de préface extrêmement intéressante et pertinente sur les causes de cette jeunesse soucieuse, et l'idée d'expliquer un mouvement artistique par des fait socio-historiques n'est pas sans me déplaire.
Dans tous les cas, un classique qu'il faut avoir lu au moins une fois dans sa vie.

mardi 24 mars 2009

La vie de Liszt est un roman (Zsolt Harsányi)

Dernière critique en retard, en ensuite je suis à nouveau à jour, ce qui tombe bien puisque j'ai presque terminé les Confessions d'un enfant du siècle et que je retourne tout bientôt à Paris pour quelques jours, avec plusieurs musées au programme, et des concerts aussi.


Actes Sud, 532 pages


Quatrième de couverture:
Il se décida pour une partition de Beethoven. La sonate pour piano en ré majeur opus 10. Il aplatit la feuille, ses yeux étincelaient de joie. Le mouvement presto de la sonate, le premier, commençait par une octave plaquée de la main droite. Il pensa au supplice affreux que lui avaient fait endurer les octaves quand il était plus jeune. Sa main était trop petite, la distance entre son pouce et son petit doigt ne couvrait pas les huit notes, quelque grands que fussent ses efforts pour les écarter. Il ne parvenait à frapper une octave qu'en trichant, d'une main qui se déplaçait à la vitesse de l'éclair. A l'âge de sept ans il jouait encore ainsi. A cette époque il se récitait chaque soir des prières secrètes pour que ses mains grandissent plus vite, et plus d'une fois l'envie le traversa de se taillader entre les doigts avec le rasoir de son père. Il était tourmenté par le désir indicible de pouvoir jouer à n'importe quel prix ce qu'il voyait imprimé sur les partitions. Alors qu'il déchiffrait pour la première fois une composition de Ries, il découvrit avec stupeur qu'il fallait de la main gauche frapper une dixième. Comment pourrait-il donc taper de sa petite main un intervalle de dix notes ? Son zèle démesuré le rendit inventif : tandis que de sa main droite il jouait en haut la mélodie, et en bas, de la gauche, la note inférieure de la dixième, il se pencha au-dessus du clavier et frappa du bout de son nez la note manquante. Son père fut secoué de rire pendant plusieurs minutes puis il le serra contre lui et l'embrassa. Mais lui ne riait pas. Il haïssait son impuissance.


Mon avis: ****
Une biographie romancée, c'est toujours à prendre avec des pincettes, car il y a forcément une part de fiction - si on nous débitait une suite de dates et faits, ce serait sec et ennuyant, même pour Liszt. On veut quelque chose de vivant, alors on est forcé d'inventer, et quand bien même on étudiais longuement la personnalité de Liszt, les discours et états d'âme resteront le fruit de l'imagination de l'auteur, de sa vision du personnage, de sa compréhension des événements.
Toutefois, si ce livre ne saurait servir de référence pour des études "scientifiques" sur le compositeur, il n'en demeure pas moins un très bon compagnon dans la compréhension du génial musicien que fut Putzi, et offre au lecteur un aperçu panoramique des différentes personnalités qui marquaient la vie non seulement musicale, mais également culturelle, sociale et politique durant la vie de Liszt.
Et nul doute que d'éventuelles erreurs auront tôt fait d'être rectifiées à la lectures de livres plus scientifiques. Voir directement à la lecture de celui-ci - le Righi qui est en réalité le Rigi, Madame Wesendonck qui s'appelle Mathilde et non pas Matild, etc.
Un roman qui se lit vite et agréablement, prenant et instructif, et certainement une bonne première approche de cet étrange personnage que fut Franz Liszt. Voir une approche tout court, pour ceux qui n'ont pas la chance d'étudier la musicologie.

lundi 23 mars 2009

l'ESN invite un chef et un soliste pour un programme placé sous le signe de la création

Temple du Bas, Neuchâtel, dimanche 22 février 2009, 17:00


C'était dimanche. C'était les vacances. J'avais oublié ce léger détail, qui s'est avéré être de première importance lorsque j'ai consulté l'horaire des bus à l'arrêt: rien avant une demie heure. Sauf que dans une demie-heure, mon concert aurait déjà commencé. Il a fallu aller à la gare, attendre, attendre, puis sortir en courant, traverser la ville au triple galop, glissant dans la neige collante, et entrer à la dernière minute dans le Temple du bas. Ouf!


Deux pièces contemporaines dont une création, un concerto et une symphonie. De quoi rester bien réveillé. L'ESN - Ensemble Symphonique de Neuchâtel (fusion entre l'OCN et l'OSN (orchestre de chambre, respectivement symphonique de Neuchâtel) jouait sous la baguette de l'excellent chef invité Noam Sheriff et avait l'honneur d'accompagner le grand clarinettiste Pascal Moraguès dans le concerto pour clarinette de Weber.
En préambule au concert, Noam Sheriff a pris le micro, pour expliquer, dans un anglais à l'accent chaleureux et plein d'humour, les deux pièces contemporaines, la création de Vincent Pellet, et sa propre composition, Prayers. Une initiative encore trop peu prise, alors qu'on sait à quel point la connaissance aide à la compréhension, qui elle est un élément clé dans l'appréciation d'une œuvre. Donc - commentez, ou faites commenter les œuvres, parce que le nombre d'auditeurs qui lisent le programme est très restreint.

La soirée s'ouvrait sur ESN 253, commande de l'ESN à Vincent Pellet, présentée en création mondiale. J'avais déjà eu l'occasion d'entendre l'une de ses oeuvres lors du concert de clôture du conservatoire neuchâtelois, si ma mémoire est bonne, et je crois pouvoir affirmer que j'ai du plaisir à ses compositions. Cette nouvelle partition entendue ce soir n'a pas changé mon opinion. Je n'ose pas trop m'aventurer à une présentation de l'oeuvre, car les notes prises dans mon petit carnets s'enchevêtrent d'une telle manière qu'il me paraît impossible de ne pas mélanger les éléments des deux compositions contemporaines de cette soirée. Mais, si je ne m'abuse, c'est bien chez Pellet que le thème ne fait curieusement son apparition qu'à l'extrême fin. Et pour éviter de trop m'embrouiller, voici le court - trop court! - descriptif tiré du programme:


Commande de l’Ensemble Symphonique de Neuchâtel, ESN 253 fait référence au métal radioactif découvert pour la première fois sous la forme de son isotope 253, récupéré dans les débris résultant d’une explosion thermonucléaire (bombe H) : l’einsteinium (Es). En physique nucléaire et en chimie, deux atomes sont dits isotopes s’ils ont le même nombre de protons en leurs noyaux mais un nombre de neutrons différent. On obtient de l’einsteinium (Es) en bombardant les atomes de plutonium avec des neutrons lents (n), ce qui aboutit aux initiales Esn. Dans la pièce « Esn 253 », les différents éléments chimiques de l’einsteinium sont représentés par des sons clefs : H = si, Es = mib, etc… L’oeuvre est construite en une suite de réactions en chaînes. Deux séries de notes distinctes se confrontent, ce qui aboutit à de nombreuses explosions sonores et de flux rythmiques. Les différentes unités rythmiques et harmoniques vont peu à peu s’organiser, fusionner pour se transformer en une ligne homogène puis une seule note, le mib.
Vincent Pellet.


Noam Sheriff expliquait également la symbiose des Juifs allemands de la fin du XIXe siècle, dans leur combination entre culture, intellect, etc. On citera évidemment Einstein, mais également Freud et Schönberg, qui ont changé le monde, volontairement ou involontairement, progrès ou catastrophe.
Une oeuvre que l'orchestre et le chef semblaient avoir à coeur, et qui a été jouée avec beaucoup d'engagement.

Venait le concerto pour clarinette de Weber, lequel nous a permis d'admirer la musicalité et la virtuosité du soliste. Dans cette pièce, on sentait malheureusement également un orchestre quelque peu déstabilisé par la présence d'un soliste et d'un chef invité, et à plusieurs reprises, chacun a du y mettre du sien pour que soliste et orchestre jouent la même musique, avec un conflit évident dans le troisième mouvement, entre l'orchestre qui s'accrochait au tempo pris par leur chef et un Pascal Moraguès qui tentait de prendre de la vitesse à la moindre occasion. (Ce qu'il a d'ailleurs confirmé au moment de donner son bis, qu'il a annoncé comme La même chose, mais plus vite.)(Mais l'orchestre a gardé son tempo avec une précision de métronome.)
Pascal Moaraguès a un son absolument époustouflant dans les sonorité piano, noble et plein, tout ce que la clarinette sait offrir de meilleur, et une virtuosité facile, presqu'en passant, avec une joie quasi enfantine à être sur scène. Par contre, j'aime moins ses forte, mais cela, c'est sans doute plus dû à mon rapport avec l'instrument qu'aux capacités du soliste; la clarinette ne cessera jamais de m'intriguer pour la noblesse de son son dans les faibles puissances d'une part - quel plus beau dolce que celui produit par une clarinette? - et la coleur criarde à la limite du vulgaire dès qu'il faut donner de la puissance.

Prayers de Noam Sheriff, c'est la chaleur écrasante du midi, dans les rues vides et immobiles, avant que tout cela ne s'anime en discussions virulentes, like an disput in a synagogue. Les arguments fusent, le ton monte, la tension également, avant de retrouver ce Es synonyme de paix, comme si tout le monde s'était mis d'accord. Vous pouvez le lire, une oeuvre et une interpretation très imagée, presque un théâtre.

En final, la 8ème de Beethoven, pour laquelle l'acoustique du Temple du Bas ne semble pas adaptée. Elle m'a paru beaucoup trop sèche pour cette pièce chaleureuse et passionnée. C'était bien pour les œuvres contemporaines, et puis Weber, pourquoi pas. Mais pas pour ce Beethoven. Cela manquait également de fusion entre les vents et les cordes, qui sonnaient comme deux clans distincts, les Montagues et les Capulets de l'orchestre (Le chef et le percussionniste étant les neutres, ou Roméo et Juliette). Mais malgré cela, les musiciens se sont jetés sur ce Beethoven comme des affamés, tout à leur affaire, heureux de jouer cette musique grandiose - un peu trop pour les cuivres, excessivement forts et mal accordés (Les cors!!!) - qui fuse de partout, tourbillonne et vous laisse complètement abruti après l'évanouissement de la dernière note.

mercredi 18 mars 2009

La Fondation Beyeler vogue à Venise, de Canaletto et Turner à Monet

Vite, vite, hurry up! Trois jours à peine avant la fin de cette exposition, dont nous parlions déjà en juillet passé, Momo'n et moi sommes retournés à la Fondation Beyeler. Retrouver les grincements du petit train, les wagons allemands à Basel Badischer Banhof, et les maisons coquettes de Riehen.
Mais - enöff, comme dirait la tante dans Der Turm de Tellkamp.

Les expositions de la Fondation Beyeler sont généralement assez petites, en raison de la taille des locaux, ce qui est bien lorsqu'on aime pas trop les toiles présentées (comme ce fut le cas pour Fernand Léger, décidément pas mon peintre), mais qui s'avère vaguement frustrant lorsque l'exposition est plaisante, comme le fut celle-ci, dédiée à Venise.

Parmi les artistes représentés figuraient Monet, Signac, Canaletto, Manet, Turner, Singer Sargent et son copain Whistler, Renoir. Et quelques autres.
C'était surprenant de voir des paysages peints par les grands artistes Whistler et Sargent de la fin du XIXe siècle, que je ne connaissais que sous leur angle de portraitistes. Chez Sargent, on voit une réelle mise en scène du spectateur, qui se trouve dans le décor -j'ai fait de la gondole pour la première fois de ma vie à Bâle, dans une galerie.
Suivaient les toiles colorées comme des dragées de Signac, quelques pièces maîtresses de Monet, complétées par des oeuvres d'Odile Redon, Edouard Manet, Claude Renoir. Une salle dédiée au croquis de Whistler et Sargent, une autre au dramatisme de Turner, avant de terminer avec Canaletto et Guardi, et leur precision minutieuse.
Une exposition extrêmement diversifiée, et qui présente assez bien les différentes visions de Venise au fil de l'histoire de l'art, bien que celle-ci semble s'arrêter aux impressionnistes. Mais mis à part l'absence totale de peinture contemporaines, l'après-midi dans les murs de la Fondation était des plus agréables, comme toujours. Et se termine en admirant, une fois n'est pas coutume, les Nymphéas de Monet, dont la Fondation possède une toile.

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compte rendu ici et ici également.

De cape et de larmes (Nina Berberova)

Dernière nouvelle de ma série de Nina Berberova avalée en deux jours, début mars. Ici, on retrouve le quotidien de grisaille, d'alcool et d'absence d'espoir de la Russie soviétique du début du siècle, telle qu'on la connait également chez Makine.

Actes Sud, 96 pages


Quatrième de couverture:
Elles étaient deux sœurs, Ariane et Sacha, à Pétersbourg en 1920, et les voici ressuscitées sous nos yeux en quelques traits d'une efficacité incomparable. Leur mère est morte et le nouveau régime les contraint de vivre avec leur père dans une précarité insupportable. Ariane décide donc de suivre Samoïlov, un théâtreux marié, et laisse à Sacha, la narratrice, le soin d'en avertir le père, de lui porter ce coup. Vingt ans plus tard, à Paris, Sacha retrouve Samoïlov qui revient du goulag. Ariane est morte, le père aussi... Leur rencontre est comme une apostille dur le destin.


Mon avis: *****
Je ne sais pourquoi la désolation de la Russie communiste me fascine à ce point. Nina Berberova la peint ici dans une chambre exiguë, le divan partagé par les sœurs qui dorment tête-bêche, Sacha entourant de ses bras les genoux de sa grande sœur adorée, le père au rire nerveux derrière un paravent. La comtesse polonaise qui vient raconter des histoires d'avant, les courses dans la neige pour un quignon de pain.
Tout comme ses compagnons d'infortune, Nina Berberova décrit la vie précaire avec simplicité et humilité, sans pathos ni révolte, faisant sienne la devise Es muss seyn qui ouvre le quatuor op. 135 de Beethoven et que Kundera utilisera comme Leitmotiv dans son Insoutenable légèreté de l'être. Résignation et privation de la petite Sacha à Pétersbourg, résignation et privation de la jeune Sacha à Paris. There's no hope. Il faut se débrouiller pour (sur)vivre jusqu'au lendemain,;les hommes naissent et meurent, dans l'indifférence générale, inlassablement, et chaque jour recommence comme le précédent.

mardi 17 mars 2009

Le roseau révolté (Nina Berberova)

Suite des critiques de mes dernières lectures, il faut que je me dépêche, sans quoi je vais définitivement prendre trop de retard.

Actes Sud, 68 pages


Quatrième de couverture:
La guerre, en septembre 1939, sépare ces amants. Lui, Einar, part pour Stockholm. Elle reste à Paris, afin de s'occuper d'un vieux savant que les Allemands finiront par arrêter. La paix revenue, elle écrit à Einar, en Suède, des lettres qui reviennent: destinataire inconnu. Jusqu'au jour où, allant là-bas, elle découvre...


Mon avis: *****
Dans cette autre nouvelle de Nina Berberova, on sent un désespoir résigné, le vieux savant sont il faut s'occuper, l'arrestation et la mort de celui-ci, les livres qui lui restent. Puis cet homme, que la jeune émigrée russe aime encore, qu'elle retrouve en Suède. Qu'elle retrouve privé de son no man's land. Et cette femme qui veut la priver elle aussi de cet espace. La nouvelle se termine ici dans une sorte de cri de victoire - moi, je ne me laisserai personne me dicter ma vie; je garde ma liberté. Et ma fierté. Et la jeune femme russe s'en va.
Un appel à garder sa dignité coûte que coûte, au détriment d'un bonheur trompeur et médiocre, et Nina Berberova qui nous offre un moment riche en émotions qu'elle appose comme de petites touches de couleurs d'une toile impressionniste.
Le roseau se révolte et refuse de se plier.

lundi 16 mars 2009

La grande ville (Nina Berberova)

Après avoir retrouvé Joseph Joffo dans les rayons de la bibliothèque, j'ai eu très envie de retrouver l'univers de Nina Berberova, univers gris et morne de ceux qui vivent en exil. Univers douloureux de la désillusion. Et cette solitude devenue maîtresse des vies. Trois nouvelles, dont voici mon compte rendu pour la première, La grande ville.


Actes Sud, 30 pages


Quatrième de couverture:
J'ai compris que chacun avait apporté dans cette grande ville ce qu'il avait: l'un, l'ombre du prince d'Elseneur, l'autre, la longue silhouette du chevalier espagnol; le troisième, le profil du séminariste de Dublin, cet immortel; la quatrième, un rêve, une idée, une mélodie. La chaleur torride d'une vallée, le souvenir d'une tombe ensevelie sous la neige; une formule mathématique, divine dans sa grandeur, ou le tintement des cordes d'une guitare... Tout cela s'est fondu dans cette ville, sur ce cap, formant cette vie à laquelle je m'apprête à participer.


Mon avis: *****
Vingt-trois pages. Et c'est tout un monde, avec ses sensations, ses senteurs, ses odeurs, ses saveurs et ses émotions qui s'ouvre, comme la mer qui apparaît subitement, au détour de la route. Nina Berberova, c'est ce don extraordinaire de nous peindre un récit en quelques coups de plume, puis de l'animer, comme Dieu qui souffle sur Adam pour lui donner la vie. Nous nous trouvons ici dans une grande ville, probablement aux USA, l'émigré débarque, il n'a presque rien, et le souvenir de cette femme sur les bords cléments de la Méditerranée. Sans doute d'inspiration autobiographique (la nouvelle a été écrite en 1952, deux ans après l'émigration de l'écrivain aux États-Unis), le texte est empreint de mélancolie, et de ce vide sidéral qui caractérise l'œuvre de beaucoup d'émigrés d'une part, et l'œuvre de Nina Berberova d'autre part. Simple, sans pleurs, sans plaintes ni soupirs superflus, Nina Berberova épure sons récit pour n'en garder que l'essence de celui-ci.

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une très bonne critique ici.

La jeune fille au pair (Joseph Joffo)

Jeudi, je me suis évadée à la bibliothèque après mon cours de piano. Je voulais entre autre retrouver le titre et l'auteur d'un roman sur le Christ que j'avais lu il y a quelques années (La dernière tentation du Christ de Nikos Kazantzaki, qui a apparemment inspiré le film contesté de Scorsese, que je n'ai quant à lui jamais vu - beaucoup trop violent pour moi). Bref. Et je me suis retrouvée face aux romans de Joseph Joffo, l'auteur du grand classique Un sac de billes que j'avais lu dans mon enfance, ainsi que toutes les oeuvres en possessions de la bibliothèque. Toutes? Non! J'ai tiré du rayon un livre intitulé la jeune fille au pair, en me disant, ben tiens, exactement ce que je fais en ce moment! En lisant la quatrième de couverture, j'ai réalisé que c'était même exactement ce que je suis en ce moment:

Hachette, 186 pages


Quatrième de couverture:
Montmartre; à la Libération.
Jeune Allemande arrivée à Paris, Wanda devient fille au pair auprès d'une famille juive, les Finkelstein. Elle espère ainsi pémétrer dans cette communauté et comprendre ces gens que les Nazis avaient voués à l'extermination.
Peu à peu, grâce à Samuel, Hélène et leurs enfants, la jeune fille va dépouiller ses préjugés et commencer d'apprécier et de mieux comprendre ce peuple qui se découvre à elle. Pourtant, malgré l'amitié neuve qui la soutient, il lui arrive de disparaître sans raison ni objet. Qu'est-elle venue chercher là, en fait? La paix? Le pardon, la libération de sa mémoire? Et si oui, de quoi? Quel est le secret qui hante la vie de Wanda?
Ce récit bouleversant, mais tendre et drôle aussi, est l'histoire d'une expiation où le coeur mène l'esprit, où l'apprentissage de la fraternité humaine débouche sur une véritable conversion intérieure.


Mon avis: *****
Ces distribution d'étoiles sont toujours extrêmement subjectifs et imprécis. Il est évident qu'il y a des auteurs que je trouve plus "littéraires", qui ont un usage de la langue beaucoup plus raffiné et percutant. Mais Joseph Joffo a été un des auteurs qui ont bercés ma pré adolescence, et qui m'ont permis d'entrer un peu dans le destin noble et douloureux du peuple Juif. Et ce roman est un très bel acte de réconciliation envers les Allemands de cette génération - sa génération - qui a subit la guerre dans son enfance et qui s'est retrouvée avec le poids immense de la faute de ses parents. Mais le récit touche également la deuxième génération, celle des petits-enfants de ceux qui ont porté les armes. Étant moi-même Allemande de par mon père, je me suis retrouvée dans le personnage de Wanda. Que fais-je d'autre que de tenter, depuis ma prise de conscience du lourd passé de mon pays, de me réconcilier avec l'horreur nazie? Comme Wanda, je me sens coupable - le fait que je n'aie pas moi-même tué n'est pas un argument valable; j'ai eu la chance de naître quarante ans après la guerre, c'est tout. C'est rien. Et, comme Wanda, j'aimerais partir comme jeune fille au pair, officiellement pour apprendre une langue, officieusement pour vivre au sein d'une famille juive, les aimer, chercher le pardon. Joseph Joffo a su se mettre dans la peau de ceux dont les parents ont déporté ses propres parents, tué son père, ses oncles, ses tantes, ses amis, et mettre le doigts sur leurs souffrances d'enfants de bourreaux. Je salue le courage, la sagesse et l'amour de Joseph Joffo.

jeudi 12 mars 2009

Schachnovelle (Stefan Zweig)

Nichts geht mehr: die Literatur hat hier die Musik überholt. Ich muss dringende Massnahmen ergreifen, um dies zu beheben. Also nach diesen Einträgen wird hier weider mehr über Musik geschrieben. Ich hoffe auch, dass ich bald wieder mal ins Konzert gehen kann. Nun aber - Stefan Zweig, die erste Begegnung.

Fischer, 110 Seiten

Meine Meinung: *****
Um halb Zwölf in der Nacht habe ich das Buch aufgeklappt, und nach zehn Seiten spätestens war mir klar dass ich das Licht nicht auslöschen würde, ehe ich diese Novelle zu Ende gelesen hätte. Und so war es dann auch. Um zwei Uhr morgens war ich fertig damit, und zeimlich verwirrt durch diese Atemberaubende Geschichte. Und fands schade, dass ich Schach nie richtig spielen gelernt habe, dabei möchte ich schon seit Jahren spielen. (Am gleichen Abend hatte ich auch noch einen Film gesehen, der sich um Poker dreht, dass ich noch weniger behersche.)(Grosse Frustration also.)
Es fällt mir ziemlich schwer zu sagen, was mir in dieser Novelle so gefallen hat. Es war mir einfach unmöglich, das Buch loszulassen, obwohl ich, wie gesagt, von Schach keine Ahnung habe. Wenn Zweig immer so fesselnd ist, dann freue ich mich sehr auf weitere Lektüren!

samedi 7 mars 2009

Abendlicht (Stephan Hermlin)

Da bin ich wieder. Ich lese viel, ich hole nach, so viel ich nur kann - die Tage werden sachte länger.

Salto, 96 Seiten


Klappentext:
Hermlin, einer der grossen Schriftsteller der DDR, erinnert sich an die dreissiger Jahre.
An Beobachtungen und Erfahrungen eines jungen Mannes aus gebildeter bürgerlicher Familie, der auf der Strasse zum Kommunisten wird und so beides aus fremder Nähe wahrnimmt: das Grossbürgertum, das die heraufkommenden Nazis als barbarische Horde abtut, und die Arbeiter, die sich - hilflos und oft schwankend - widersetzen.
Ein Porträt deutscher Irrungen, das uns unsere jüngste Geschichte in absurden, bitteren und aussergewöhnlichen Bildern nacherzählt.


Meine Meinung: ****
Eine sehr kurze, aber reiche Lektüre, die mir sehr gefallen hat; die kapitel sind schon fast Bilder, kontrastreich und farbenfroh. Wie gern habe ich am langen Tische platzgenommen, und dem schönen Vater zugeschaut!
Jetzt möchte ich ein altes Haus mitten in einem grossen Garten, und einem Flügel, und wir der Vater würde ich dann jeden Morgen eine Stunde oder zwei aus dem Wohltemperierten Clavier spielen...

mardi 3 mars 2009

Die Flegeljahre (Jean Paul)

Une lecture pour la musicologie: j'ai dû rédiger un travail de séminaire sur les caractères Eusebius et Florestan, dans Carnaval op. 9 de Schumann, et comme le compositeur s'inspire grandement de ce roman, hop! la bonne excuse est trouvée - non, je peux pas passer l'aspirateur, je travaille, là.

Ah oui, et puis je dois switcher à l'allemand, puisqu'il s'agit de littérature allemande. *switch!*

Reclam, 752 Seiten


Auszug:
Eigentlich versteht niemand als nur Gott unsere Musik; wir machen sie, wie Taubstumme Schüler von Heinecke Worte, und vernehmen selber die Sprache nicht, die wir reden.


Meine Meinung: ****
Eine für mich nicht ganz einfache Lektüre. die Sätze sind oft lang und komplitziert, man vergisst den Anfang ehe man zu Ende ist. Aber ich habe mich mich schliesslich daran gewöhnt - an den Stil, nicht an das Vergessen. Wult und Valt, Zwillinge, wie Tag und Nacht: der ein blonder träumerischer Dichter, der andere ein schwarzer, neckischer Musiker. Ein tragischer Bildungsroman, in dem der naive Eusebius und der erfahrene Florestan dasselbe Mädchen lieben. Zwei ganz verschiedene Charakterzüge, die möglicherweise die zwei verschiedene Philosophien verkörpern, die Jean Paul geprägt haben: die Gefühlsphilosophie Jacobis und die Erfahrungstheorie von Fichte.
Einige Themen tauchen schon fast wie Leitmotive auf: Schmetterlinge und Masken, die Schumann zu seinen beiden frühen Klavierzyklen Papillons op.2 und Carnaval op.9 inspiriert haben.
Eine bezaubernde Lektüre, mit einer Prise Philosophie.